Guy Bellay, Pour vivre, poème [Possibles, nouvelle série n° 1, octobre 2015]]

Guy Bellay, Pour vivre
[1975] un poème des Charpentières, page 71


Pour vivre

Dors, appuyée sur moi au chambranle d’une porte, les yeux clos à ce qui t’est proche. Il me reste plus que ton corps,

ayant soulevé ta tête pour que tu voies naître tes enfants. Je me croyais fait pour aller solitaire. J’en avais parlé entre tes bras, entre tes jambes, à grandes caresses, pour leur donner raison d’être ta vérité,

cherchant en toi liquéfiée de tendresse ce qu’il faut d’amour pour vivre bien.

Mon contraire en est venu, de toi toute en sueur, en pleurs et en sourires, tandis que ta nuque tournait dans le creux de ma main pour s’y enfoncer – en moi qui n’étais plus le passant que tu avais suivi.

Le jour, je vais un enfant à chaque main,

équilibré comme un porteur d’eau.

La nuit, en secret, je souhaite un bonheur qui n’apaise pas l’existence entre nous.

Guy Bellay, Restez. Je m’en vais, éd. Saint-Germain-des-Prés, 1975, repris dans Les Charpentières, éd. Le Dé bleu, 2002
Malgré des recherches, nous n’avons pas retrouvé l’ayant-droit de ce poème. Qu’il nous excuse.


Guy Bellay est décédé le 26 septembre 2015. Bernard Bretonnière l’a fait savoir sur Facebook. Une page est consacrée à Guy Bellay sur la Maison de la poésie de Nantes reproduisant une belle note de Daniel Biga. Une autre sur Wikipoèmes.com oublie les guillemets et ne cite pas sa source ! Le volume Les Charpentières est disponible aux éditions Éclats d’encre. [On excusera les paradoxes qu’offre ce premier numéro. La “découverte” à un poète né en 1932 ; la consécration à plus jeune et partie bien avant lui ; le choix de reproduire une préface, page précédente. Mais justement, c’est sortir du cadre pour mieux le fixer. – P. P., 2 octobre 2015]

Hier : Yves Martin lit Joyce Mansour —>

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