Jean Vasca, Possibles n° 45, juin 2019

Jean Vasca
Le contemporain de ce numéro de juin 2019

Le fleuve

C’est un fleuve en moi qui rame et qui roule
Rumeur en amont que gonflent les crues
Il avance en moi comme en pleine terre
En rongent les berges en cognant les quais
Il vient de si loin des contrées du coeur
Il a pris sa source là-bas dans l’enfance
J’en remonte encore malgré le courant
Des mots ruisselants de ses eaux profondes

C’est un fleuve en moi comme une douleur
Lente lancinante et longue à mourir
Blessure de vivre ouverte dans l’être
Qui saigne sans fin O sa coulée noire
Dans ses fonds mouvants s’enlisent des rêves
Des désirs croupissent dans tous ses bras morts
Et dans ses remous divague et dérive
Quelle épave en moi en moi qu’elle fièvre

C’est un fleuve en moi qui pourtant bouillonne
Ses boueuses sèves grand fleuve du sang
C’est le chant qui court tout au long des veines
Inondant soudain ma nuit mon désert
Fleuve de printemps qui partout débâcle
Charrieur d’étoiles et d’éternité
C’est le fleuve Amour écartant ses rives
Qui descend vers vous comme vers la mer.

Jean Vasca, L’Été d'être, Le Cherche-Midi, 2002


Jean Vasca, Amis soyez toujours —>

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