Yves Martin, Possibles n° 16, janvier 2017

Yves Martin, Poèmes courts suivis d’un long
Le contemporain pour ce numéro de janvier 2017

Quand j’ouvre ma porte / Sur des milliers de livres / Je devine – un instant –
Quelque chose de moins que la vie / Cependant plus intense.

Yves Martin, Poèmes courts suivis d’un long, éd. Chambelland, 1969

Elle s’inclina. Étincela

Yves Martin par Paul Cendron (1994)

Elle s’inclina. Étincela,
Noua, d’un trait, ses cheveux courts.
Dire que nous aurions pu marcher ensemble
Devant la seule maison qui me bouleverse.

La pluie s’est tue. Paris lève
Une auto, des hommes chantent
Elle prend une cigarette, l’abandonne
Je m’avance, hésite, tremble.

L’ombre bleue, les passants limpides
Un baiser immense. Une vie immense
Je te prends l’épaule, nous nous prenons la main
Ne pas écrire. Le cœur est formidable.

Diaspar

Il était neuf heures lorsque j’arrivai à Diaspar.
Les rues étaient lentes. Les chiens indolents.
Nulle féerie. Certes, le vent était bleu
Et j’aperçus aux fenêtres quelques femmes magnifiques.

De tavernes, point. Où produire le tabac, où cerner l’avenir ?
J’interrogeai un badaud. Il ne me répondit pas.
Je descendis vers la mer. Rien. Je fis voile vers le quartier des bureaux. Silence.
D’immenses bœufs rôtissaient. Il fit froid. Peut-être était-ce la nuit.

Je compris que cette cité était celle des Poètes
Et que j’allais tout à la fois et de toute éternité à chaque seconde vivre et mourir .

Yves Martin, Poèmes courts suivis d’un long, éd. Chambelland, 1969
Cette mise en ligne n’aurait pas pu se faire sans l’assentiment posthume de l’auteur

Yves Martin, Le Marcheur —>

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