- Menu Possibles, nouvelle série n° 35, août 2018
- Sommaire de ce n° 35, nouvelle série, août 2018
- Contemporain : Jean-Philippe Salabreuil, Petite
- Jean-Philippe Salabreuil, Sur un champ de ténèbres
- Jean-Philippe Salabreuil, La chambre à feu
- J.-P. Salabreuil par Jacques Réda et Isabelle Lévesque
- Découverte : Isabelle Lévesque, Ni loin ni plus jamais
- Invitée : Andrée Chedid, Textes pour un poème
- Frédéric Tison, Aphélie suivi de Noctifer, trois extraits
- Lecture de Le dernier bain, roman de Gwenaële Robert
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sommaires
- Avis de parution n° 35 pour relai vers les amis
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Frédéric Tison
La page “invitation” de Possibles, n° 35, août 2018
Crois-tu prendre corps dans ta réalité ? Ta réalité ! Le vent souffle sur ta réalité, les herbes la recouvrent.
Frédéric Tison, Aphélie suivi de Noctifer, coll. Les HSE, Librairie-Galerie Racine éditeur, 2018
Sixième heure, none, extrait VII

Il y a autre chose que le vent dans le vent qui s’en va.
Il y a l’heur et le malheur de tes voix, il y a des yeux clairs, des mondes et des corps, des milliers de tendresses.
Il y a d’autres mondes, d’autres corps — et l’amour et son corps, et l’échec de tes eaux ; des prières, des oiseaux, des appels sans mémoire et des tombeaux déserts, les voix des sirènes et des faunes — et les rêves des Thries, les arpèges des lunes et des soleils, des Heures éternelles.
Il y a autre chose, il y a autre chose que le vent, dans le vent qui s’en va…
Sixième heure, none, extrait VIII
Revenir à toi dans cette ville que tu aimes…
Tu te souviens d’avoir vécu près d’une fenêtre d’argent — d’avoir aimé ce visage traversé d’oiseaux blancs. Tu te souviens d’un bateau bleu, d’un Christ pris dans un filet de pêche. Tu te souviens des parterres à la française au haut des falaises, tu te souviens d’une ancre d’or et d’un adieu.
A-t-elle vieilli, ta belle, ta radieuse ville, est-ce ton regard, le ciel ou la mer ?
Septième heure, vêpres, extrait X et dernier
Je touche tes épaules, je laisse glisser mon ombre sur la pierre d’angle de tes portiques. Je suis l’ombre qui toujours t’a suivi. Comme toi j’ai demandé — à l’eau, à l’arbre, aux villes et aux hommes — qui je suis.
J’ai travaillé — ainsi que l’air, la vague, le feu, ainsi que le bois, la semence et l’ordure — à la vie. J’accompagne ce qui passe, ce qui demeure et appelle ; je suis ce qui se narre, s’oublie et s’invente après toutes les pluies.
Je suis la fumée sur une veine de marbre — la brèche sur l’écorce. Je suis quelque clef pour un millier de serrures. Je me tiens près des havres ; je suis celui qui veille les phares.
Je suis le nom auquel tu n’as jamais pensé.
Frédéric Tison, Aphélie suivi de Noctifer, coll. Les HSE, Librairie-Galerie Racine éditeur, 2018
[Le lien ci-dessus conduit sur la page de l’éditeur du recueil qui donne à lire trois autres extraits]
Frédéric Tison est apparu dans Possibles n° 9 pour Le Dieu des portes. C’est un poète exigeant, qui manie la langue à la perfection. Il est de ceux qui resteront, si la notion de beauté, dans la littérature, garde un sens pour les siècles à venir.