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Marie-Josée Christien, Petites notes d’amertume
[Hier : Reprise du n° 13 [4ème trimestre 1977]

L’art est la matérialisation de notre besoin de sacré.
La poésie n’a pas pour but d’expliquer le monde mais de le vivre intensément, et par là espérer le comprendre.
Ce que je cherche dans la lecture d’un poème ? Le tremblement qui le traverse.
On a trop souvent confondu avant-garde et élite. Aux avant-gardes je préfère les éclaireurs, et surtout, de loin, les indispensables sourciers.
L’oubli n’existe qu’en surface. Il n’efface pas tout.
Quand, au cours d’une conversation, je suis d’accord avec mon interlocuteur, je suis ouverte, pleine d’esprit et de bon sens. Mais si j’ose émettre un avis contradictoire, je suis agressive, péremptoire et pétrie de certitudes. Étonnant, non ? [page 28]
Si on n’est pas capable de soulever des montagnes pour un ami en difficulté, l’amitié n’est qu’un mot creux sans réalité.
Pour accéder à la pensée véritable, le plus court chemin n’est pas la ligne droite mais la spirale.
L’exigence doit avant tout viser soi-même.
Quand on se suicide, on a déjà cessé de vivre.
Dans les années quatre-vingt, nous n’avions plus de futur. Aujourd’hui, nous n’avons plus de présent. Bientôt on nous volera même ce qu’il nous reste de passé. [p. 33]
Il est symptomatique que notre époque préfère les livres anodins, sans mystère, et leur glu de banalités travestis en jeux de langage et grimaces mondaines. Porteurs d’oubli, ils agissent comme un efficace somnifère.
Marie-Josée Christien, Petites notes d’amertume, préface de Claire Fourier, éd. Sauvages, 2014
Poète invitée : Colette Fournier, deux inédits —>
Marie-Josée Christien, poète et critique, vit à Quimper en Bretagne. Elle est responsable de la revue Spered Gouez / l’esprit sauvage qu’elle a fondée en 1991. Lauréate du prix Xavier-Grall pour l’ensemble de son œuvre, elle est présente dans une trentaine d’anthologies et d’ouvrages collectifs et traduite en allemand, bulgare, espagnol, portugais et breton. Elle a publié une vingtaine d’ouvrages. On trouvera ceux-ci sur son site personnel. Ses Petites notes d’amertume s’avèrent particulièrement vivifiantes. Claire Fourier dans sa préface les tient pour « une levée de pensées » et même « des amers (des repères sur la côte) […] une goutte de pensée qui coule sur la joue ». J’en recommande à mon tour vivement la lecture. Marie-Josée Christien y écrit sobrement tout ce qui tend son existence, la poésie qui se donne en partage, une éthique, celle de la basse extraction à la conquête d’une identité plénière, mais dans un sens aigu de la justice et de l’amitié sans faille. La dernière note consigne : « Rester digne rend la vie habitable. » Elle vient de faire l’objet du n° de mars de la revue Chiendents.