- Menu Possibles, nouvelle série n° 34, juillet 2018
- Sommaire de ce n° 34, nouvelle série, juillet 2018
- Contemporain : Patrice Cauda [par C. Dauphin]
- Patrice Cauda, La Mère défigurée IV
- Patrice Cauda, La Mère défigurée VI
- Patrice Cauda, Une note et deux documents
- Découverte : Apolline Fontaine, deux poèmes
- Invité : Yves-Jacques Bouin, un poème
- Elisabeth Loussaut, trois poèmes et une note
- Lecture de Lettres sur la poésie de W. B. Yeats
- Tous les
sommaires
- Avis de parution n° 34 pour relai vers les amis
- Index des auteurs publiés dans Possibles
- [Pour la B.N.F] ISSN : 2431-3971
- Attente —> accès au n° 35 —> le 5 août 2018
Elisabeth Loussaut
La page “invitation ” de Possibles, n° 34, juillet 2018
Quand toutes les horloges de toutes les églises auront donné leurs heures, quand le ciel mille fois habillé de bleu, de noir et de blanc, se voilera, j’entendrai encore la voix du vent murmurer ton nom et moi, je me tairai.
Elisabeth Loussaut
Elle est plutôt pas mal

Elle est plutôt pas mal, elle ressemble de loin à une poule célèbre mais de loin seulement, enfin de très loin mais elle s’en contente. Les autres poules lui ont dit que c’était dans le brouillard qu’elle avait la tête d’une star. Ça lui a suffit, elle s’est laissée monter la crête. Elle a fait pousser ses ergots qu’elle a peints en rouge, a déposé plus de couleurs qu’il n’en faut sur son plumage arrière et s’en est allée rencontrer un coq digne de ses plumes. Elle avait une idée précise du coq qu’elle voulait séduire. Beau, riche et célèbre. Elle a visité tous les poulaillers de toute la contrée mais n’a trouvé qu’un vieux coq qui est tombé amoureux fou du rouge de ses ergots et de son arrière-train et l’a suivie. Elle lui a donné quelques coups de bec pour le chasser, non ce coq-là elle n’en voulait pas, trop vieux, trop moche, pas assez riche mais lui ne comprenait pas qu’une poule qui n’était pas de luxe ne veuille pas de lui. Il a sorti ses cocoricos les plus beaux, a bombé le torse, lui a fait voir son poulailler. Rien n’y a fait, elle a fini par perdre le Nord et n’a jamais retrouvé son clocher.
© Elisabeth Loussaut, Le Livre des visages, 12 octobre 2017
Je voudrais partir en vacances
Je voudrais partir en vacances en short à fleurs et sabots de bois à cerises. J’aimerais que la route soit bordée de platanes habillés d’été. J’aurais les jambes bronzées à force de jouer à la pinata. J’aimerais entendre les grands rirent de rien dans la chaleur du soir. Il faudrait que ce soit l’été toujours et la musique des cuivres dans les rues. Les rues avec des banderoles de toutes les couleurs pour crier que c’est la fête, que l’école est finie, que ce sera tous les jours dimanche et que les fleurs garderont leur odeur et leurs pétales. Je monterais dans la voiture de reine et les portes s’ouvriront en grand sur des routes sans fin.
© Elisabeth Loussaut, Le Livre des visages, 31 mai 2018
Un jour, je reprendrai ce train
Un jour, je reprendrai ce train qui me menait à toi, même si au bout des rails, je sais que tu ne m’attendras pas.
Ça ne fait rien, je reprendrai ce train pour avoir le souvenir de toi chaud comme tes mains. Je ne te les lâcherai pas, je te le promets.
Tu t’assiéras à côté de moi et tu parleras peut-être, si tu veux. Je ne t’interromprai pas. Cette fois, je serai silencieuse et tu aimeras.
© Elisabeth Loussaut, Le Livre des visages, 21 décembre 2015
« Elisabeth Loussaut [présentée dans le n° 8, mai 2016], Francesco Pittau et Astrid Waliszek, tous trois experts dans l’art de débusquer le complexe sous le simple, le dense sous le léger, la profondeur sous la transparence superficielle (ainsi que, dans les torrents de montagne, le sont les galets sous l’épaisseur du courant), au hasard de mon parcours ludique de ce sentier de découverte, viennent rejoindre les reflets et les ombres du chaudron de cuivre, la luisance de la paroi de grès des vases fleuris et la sombre transparence des épais verres à pied, le tintement des ustensiles et des instruments, et puis, aussi, l’éclat fugitif et toutefois inoubliable produit par ces « clous qui fulgurent » dans une quincaillerie de province. Disons que, dans leurs textes, je me sens chez moi, et je voulais les en remercier, non pas humblement, ce qui serait idiot, mais chaleureusement. [Gil Jouanard, Avignon, 29 novembre 2017]