Franck Venaille, Possibles n° 38, novembre 2018

Franck Venaille
Le contemporain de ce numéro de novembre 2018

Requiem de guerre

Parfois la nuit nos rêves comme des frères douloureux s’allongent sur notre lit. Mausissant les officiers de tout grade, de toute envergure qui, selon l’intensité des combats, leur font hanches lourdes, mains raides, voix brisé, tout compte fait : la vie à l’envers quoi !

Autour de la nuit vous transfigurez notre vie. Elle était profonde. Elle ne craignait rien avec ses passants mystérieux, ses tirs à l’arc, la facilité avec laquelle elle accueillait les belles voyageuses. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Nous nous débattons dans nos cauchemars.

Ils collent. Ils salissent. Ils mettent de côté les vêtements de séduction, vautrés, épars à terre, rien que pour le plaisir de se faire mal voir des aides-soignants.

La nuit ! On se mangerait les doigts pour lui plaisir. Ah ! Qu’elle efface nos peurs, le sentiment de mal-être dans le lit haut !

La nuit ! Qu’elle devienne artificielle.

Comme elle l’est déjà dans l’atelier des prothèses du rez-de-chaussée.

La nuit est définitivement trop aimée par ceux que nous n’aimons pas.

Franck Venaille, Requiem de guerre, Mercure de France, 2017


Raluca Belandry, Deux poèmes —>

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