Jacqueline Saint-Jean, Possibles, n° 19, avril 2017


Jacqueline Saint-Jean
[Hier : Reprise du n° 9 [2ème trimestre 1977]

Dans ce rêve muet

Jacqueline Saint-Jean

Dans ce rêve muet     je m’avance
au sein d’un silence     plein de précipices

Un immense tableau     tapissé de pupilles
phosphorescentes     me fait face comme un mur
Impossible de traverser     tous ces regards
Aucun mot de passe     pour ouvrir la paroi

Immobile     les yeux brouillés
j’entends la voix off du sommeil qui profère

Les grands silences demandent un regard vaste
[vers de Malcolm de Chazal]


Il faudrait cuver le silence

Il faudrait cuver le silence     ses vieux millésimes
        son moût de mémoire et de songe
son vin de patience     sa patine
        ses forêts d’arômes     de réminiscences

L’œil ou la langue marie     les rouges
        et les ombres La main     ivre poursuit
ses vendanges d’images     son voyage
        fragile     à travers le vif du temps

Le vacarme revient     la saveur s’éteint

Jacqueline Saint-Jean, Solstice du silence, éditions Alcyone, 2017


Poète invité : Francesco Pittau —>

Jacqueline Saint-Jean, dont vient de paraître le beau recueil ci-dessus, est déjà présente dans Possibles n° 5 pour une étude inédite consacrée à l’œuvre de Michel Baglin. Elle vient de collaborer, par une brève étude, Les Yeux ouverts sur le temps, au n° 118 de la revue Chiendents consacré à Marie-Josée Christien, pour qui elle écrit : « elle écoute l’enfant dans les eaux utérines, apprivoise la nuit pour les jeunes, approche l’énigme du chat, sort de l’oubli les bagnards creusant le canal, tend ses mots au désespoir de l’ami pour dégivrer la vie qui recommence ».


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