- Menu Possibles, nouvelle série n° 23, août 2017
- Sommaire de ce n° 23, nouvelle série, août 2017
- Contemporain : Jean Malrieu, trois poèmes
- Jean Malrieu, Nuit d’herbe
- Jean Malrieu, J’ai perdu mes jours
- Claire Fourier, Pour que vive l’édition
- Découverte : Constance Hesse-Asplanato
- Hier : Michel Merlen, Les Rues de la mer
- Invitation : André Campos Rodriguez
- Éric Poindron, Comme un bal de fantômes
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- [Pour la B.N.F] ISSN : 2431-3971
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Jean Malrieu, J’ai perdu mes jours
Le contemporain pour ce numéro d’août 2017
La solitude est un nœud bien fait. Jean Malrieu, Possibles imaginaires, éd. P.J.O., 1975
J’ai perdu mes jours comme un arbre s’effeuille. Ma force s’étale comme un fleuve à l’embouchure. Le sommeil n’est plus un abri. Il se ride comme un miroir félé.
Dans la prairie, le cœur, rude étalon, perd ses pas. Deux, dix, mille secondes de moins à vivre. Jeune, j’ai traversé les vignes en chantant. D’abord, je fus source, puis rivière. Je ne vois plus mes berges. Oiseau, mes ailes sont devenues le vent.
Boîteux, j’oscille entre deux mondes. L’âme est malade. Merveille dans l’un, malgré la pourriture et sa beauté, et ce regret qui blesse… Rigueur ailleurs. Là je suis vêtu d’ombres. Ici, de ténèbres. Je respire mal, m’amenuise. Connaissant le but qui m’épouvante, j’approche. En n’étant rien, je serai tout. Et j’ai peur.
Le temps de paraître, de crier.
Si je crie, ce ne sera pas plus terrible.
J’ai la grande innocence sur le cœur.
Et dans le ciel natal un gerfaut,
Dans le temps qu’il figure ma vie,
Plonge
Sur sa proie.
Jean Malrieu, Le Château cathare, Seghers, 1972