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Jean Pérol, L’Infini va bientôt finir
La page “invitation” pour ce livre paru à La rumeur libre, 2017
Mains blanches
Vous m’avez refusé et mes mots l’ont compris
ils n’ont jamais d’ailleurs voulu parler pour vous
il n’y a plus de chance que nos chemins se croisent
l’alléluia est mort et la plaie refermée
parmi vous ma présence n’était pas bienvenue
peu à peu chaque porte avec soin fut fermée
aux mains d’un ennemi qui voudrait tomber nu
ah qui peut aux crachats présenter son visage?
je n’ai jamais dansé dans vos querelles vaines
je n’ai pas su flatter la bête où il fallait
je me suis écarté des combats de vos haines
et peu à peu la nuit a ouvert ses mains blanches.
Jean Pérol, L’Infini va bientôt finir, La rumeur libre, fin 2017, 136 pages, 16 €
Une centaine de poèmes, répartis en cinq parties, composent le dix-septième recueil de Jean Pérol, L’Infini va bientôt finir, La rumeur libre, fin 2017. L’extrait ci-dessus est repris de la page 98, qui clôture la quatrième partie. Poète de l’amour, qu’on peut entre-lire sur ce site, il écrit aussi notre monde, comment il verse, sans retour. En tout cas, il interroge sans détour : « soulevés de haine viendrez-vous chez nous / jusque dans Paris raser Notre Dame ? » Il reste dans la ligne de cette haute analyse, que j’ai plaisir à rappeler ici : « Il détestait les hommes réunis. Dès qu’ils s’assemblent commence le camp. Commencent à croître les germes des règles du camp. C’est dans leur peau. Mettez dix hommes ensemble, la bête apparaît : la hiérarchie, le chef, le cabot, les kapos, les obéissants, les humiliés, la victime. Les pleins de zèle, les gardes-chiourmes, les projecteurs, les aboyeurs attendant dans l’ombre. En germe. Les écrasés, les écraseurs. En germe. Dans le moindre groupe qui se forme. La société aime ça, le collectif, les contrôles, les jurys populaires, c’est plus fort qu’elle, ça lui permet d’agiter ses fouets, de remuer ses matraques, de croire qu’elle est utile à quelque chose. Et vers le puant et le plus bas, aussitôt elle démarre, et elle glisse, et descend. Il n’y a qu’à laisser aller. Là est sa pente, à l’humaine et sociale nature, sa postulation vers le mal, vers ce qui abaisse, vers le sinistre et le faire souffrir, vers le faire plier. C’est sans doute de cette absence d’espoir, pour se punir et punir l’homme, que se nourrit ce désir de vengeance contre soi appliqué sur plus faible que soi. » Jean Pérol, Le Soleil se couche à Nippori, éd. de La Différence, 2007 [page 95]